Marine, étudiante en publicité à Liège est allée voir « Plainte contre X » au Théâtre de Poche à Bruxelles. Elle livre ses impressions au journal La Libre Belgique.
« Victime, comme elle le dit elle-même, de ses préjugés, Marine, 21 ans, originaire de Liège, étudiante en publicité, a longtemps cru qu’Emilie Maréchal était une ex-star du X. Voire qu’elle avait, au moins au début, aimé cela. Raison pour laquelle, jusqu’à ce jour, le porno n’émouvait pas notre jeune interlocutrice et ne la concernait pas plus que cela. Bien que banalisé, il n’est pas très présent dans son entourage et n’intervient pas dans sa sphère privée. Ni dans celle de ses copines avec lesquelles elle nous dit en parler forcément parfois. Marine n’a eu qu’un seul partenaire, son copain, qu’elle connaît depuis quatre ans maintenant. Entre eux, il n’en est pas question non plus. Le fait de pouvoir rencontrer la comédienne au bar, à l’issue du spectacle, comme le font spontanément de nombreux adolescents de 16 ans au moins qui viennent voir « Plainte contre X », lui a permis de mettre une distance entre la fiction et la réalité. Même si le texte de Karin Bernfeld, est en partie autobiographique. Séduite par le Théâtre de Poche en arrivant, par ces lumières qui éclairent la forêt noire, par ce lieu bucolique au coeur de la ville, par l’idée d’aller au théâtre, elle qui n’y va jamais, elle l’est encore plus à l’issue de la représentation et a d’ores et déjà réservé ses places pour « La théorie du Y » qui se jouera du 8 au 19 mars. « J’ai vraiment bien aimé » nous dit-elle à l’issue de la représentation même si, à la limite, cela aurait pu être encore plus choquant car comme il n’y avait pas d’images sur les mots, je pouvais encore me protéger et demain j’aurais peut-être oublié une partie. A la limite, le théâtre, c’est presque trop comfortable. Cela peut paraître bizarre de dire cela mais c’est vrai que je pouvais encore me protéger » nous explique Marine qui ajoute, par ailleurs, avoir été très mal à l’aise à certains moments. Comme toutes ces jeunes filles qui confient avoir mal au ventre pendant la représentation. A la question de savoir pourquoi les actrices de porno acceptent les humiliations, la violence et la destruction imposées, Marine répond en évoquant une possible addiction. Emilie Maréchal apportera la réponse plus tard, devant son thé, accoudée au bar en expliquant qu’en réalité, les actrices de porno, qui souvent ont été victimes d’abus sexuels dans leurs enfance ou adolescence, ont appris à se déconnecter complètement de leur corps pour supporter l’insupportable. Et de nous raconter ce réseau en Italie avec des femmes de l’Europe du Nord qui seraient d’abord enfermées trois jours dans une pièce et violées sans cesse pour être complètement anéanties et prêtes ensuite à accepter n’importe quoi. Fragmentation, déstructuration, anéantissement, lavage de cerveau…Un processus un peu semblable à celui des enfants soldats qui finit par rendre possible et pensable l’impossible et l’impensable. «